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< Actualités jurisprudentielles en Droit de la Propriété Intellectuelle
04.07.2013 15:05 Il y a: 11 yrs
Categorie: Propriété industrielle (Marques, Dessins et modèles)
Auteur : Nicolas Weissenbacher - Avocat Bordeaux - Conseil et Contentieux

Quand l'Etat porte atteinte à une marque


TGI Paris, ordonnance de référé, 23 mai 2013

Le TGI de Paris a considéré que l’utilisation du terme Dataconnexions par Etalab constituait une atteinte à la marque Data Connexion déposée dans des classes de produits et services similaires, sauf dans le cas d’une organisation de concours.

FAITS : Le requérant est titulaire de la marque française “Data Connexion” et a enregistré le nom de domaine “dataconnexion.fr. Cependant, il a découvert que le site internet www.etalab.gouv.fr reproduisait sa marque sous la forme "dataconnexions” et que l’Etat français exploitait le nom de domaine “dataconnexions.fr” pour renvoyer au site "www.etalab.gouv.fr”. De plus, l’Etat français a enregistré la marque “Dataconnexions” pour désigner des produits et services similaires à ceux du requérant. Etalab est une mission de l’Etat qui a utilisé la dénomination Dataconnexions afin de créer des concours destinés à fédérer des projets. L’Etat français a été assigné en référé devant le TGI de Paris.

DECISION : Le Tribunal a considéré que les différences entre Data connexion et Dataconnexions étant imperceptibles tant au niveau auditif, que conceptuel voire visuel, la reproduction à l’identique était caractérisée. Quant aux produits et services visés, ils sont également similaires, sauf pour l’organisation de concours, qui constitue justement le seul usage par Etalab de la marque.

INTERET : Le TGI de Paris rappelle que l’atteinte à un droit privatif, en l’espèce une marque, ne sera reconnue et sanctionnée qu’en cas d’usage dans la vie des affaires.

Notre conseil : La protection de la marque est valable pour tous, même l’État peut se voir condamné à l’issue de l’utilisation d’un signe portant atteinte à des droits antérieurs. Notons que l’importance du choix des produits et services lors d’un dépôt de marque est ici souligné et que ses conséquences ne peuvent être ignorées.

L’appréciation de l’usage sérieux de la marque

Cass comm. 19 mars 2013, n°11-29016

La chambre commerciale de la Cour de cassation effectue un rappel relatif à l'appréciation de l'usage sérieux d'une marque avec, en filigrane, l'interprétation de l'alinéa 4 de l'article L. 714-5 du CPI.

FAITS : Une société est titulaire d’une marque enregistrée désignant des vêtements de sport. Elle assigne une société concurrente en contrefaçon et concurrence déloyale pour fabrication et mise sur le marché de produits avec la marque reproduite. Le défendeur avance l’argument de l’absence d’usage sérieux de la marque par le titulaire et sollicite la déchéance de la marque.

DECISION : la Cour de Cassation casse la décision et reproche à la Cour d’appel de ne pas avoir recherché si les éléments de preuve fournis pour la première fois en appel ne justifiaient pas d'un usage sérieux de la marque plus de trois mois avant la présentation de la demande en déchéance.

INTERET : Les preuves fournies pour la première fois en cause d’appel sont donc admissibles et imposent aux juges du fond un examen. Il n’en demeure pas moins qu’ils peuvent, au terme de cette recherche, estimer que l’usage de la marque n’a pas été sérieux.

Notre conseil : Ne pas oublier que l’exploitation effective de la marque est essentielle pour défendre son titre. L’usage de la marque est une des conditions de sa validité. Un défaut d’exploitation sur une période de 5 années sans interruption, au jour du dernier acte d’exploitation, fait courir le risque d’une déchéance du titre. Il est entendu par usage, une réelle utilisation de la marque dans un cadre commercial.

La coexistence de marques peut-elle amoindrir le risque de confusion ?

TPIUE, 10 avril 2013, n°T-505/10

L'absence de risque de confusion peut être déduite du caractère paisible d'une coexistence longue des marques en conflit, sous réserve que ces marques soient identiques.

FAITS : Un titulaire de marque française s’oppose à une marque communautaire pour similitude visuelle et phonétique du signe et des produits désignés.

DECISION : le Tribunal confirme que l’absence de risque de confusion peut être déduite du caractère paisible de la coexistence des marques pendant un certain temps. Il est cependant précisé que la coexistence doit être suffisamment longue pour avoir une influence sur la perception du consommateur visé et doit être prouvée sur l’ensemble du territoire de l’Union.

INTERET
: La coexistence fait bien pleinement partie des facteurs pertinents d’appréciation du risque ou non de confusion en droit des marques.
Notre conseil : Le titulaire a un devoir de surveillance de sa marque (un usage sérieux, renouvellement...) mais aussi de ses concurrents. Il n’est jamais bon de tolérer une marque susceptible d’être reconnue comme susceptible de créer un risque de confusion sur le marché. Un contrat de coexistence de marque est envisageable pour défendre l’étendue de l’exploitation de deux marques coexistantes afin d’éviter un litige ultérieur. Soyez attentif et faites surveiller les marques, le dépôt à l’INPI ne suffit pas.