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< Le fléau de la contrefaçon
09.06.2009 11:22 Il y a: 15 yrs
Auteur : Me France Charruyer, Avocate à Toulouse - Conseil & Contentieux

De l'avantage de ne pas être sérieux

Quand le Canard enchaîné bénéficie de la clémence des juges.


Quand le Canard enchaîné bénéficie de la clémence des juges.
Lorsque plusieurs journaux s’émeuvent de ce qu’un procureur de la République bayonnais aurait, à l’occasion de la conférence des procureurs généraux d’Europe, soustrait la carte bancaire d’une collègue pour régler sa virée dans la maison clause voisine, la réaction des juges diffère selon la nature du périodique.

Le Parisien, Aujourd’hui en France et le Canard enchaîné étaient accusés par l’intéressé d’avoir porté atteinte à la présomption d’innocence en s’étant fait l’écho des faits par le biais de conclusions définitives tenant pour acquise la culpabilité de sa personne.

Si une Cour d’appel avait logiquement mis le Canard dans le même sac que les deux autres, la Cour de cassation, dans un arrêt du 20 mars 2007, a fait preuve de beaucoup de bienveillance pour absoudre uniquement l’hebdomadaire satyrique, censurant la décision au motif que « l’écrit se plaisait à souligner la discordance entre le discours public de l’intéressé et le comportement rapporté tout en s’interrogeant sur le comportement des juges appelés à se prononcer, sans contenir des conclusions définitives manifestant un préjugé tenant pour acquise la culpabilité ».

Pourtant les termes (truculents) de l’article incriminé étaient les suivants : « Une conférence des procureurs généraux d’Europe, ce n’est pas toujours marrant. Après les débats, la conférence a le droit de s’amuser, non ? C’est ce qu’a pensé P.H., procureur de la République de Bayonne, qui après un exposé sur les principes fondamentaux d’éthique pour le ministère public s’est offert une virée au bordel du coin. Ce qui n’est pas un délit… En revanche, payer ces dames avec une carte de crédit piquée à un autre magistrat est un exploit peu courant dans l’histoire de la justice. Ce qu’a fait le proc’ de Bayonne, en mai dernier lors de ce colloque organisé en Allemagne. Révélée par le Parisien (du 20 décembre), l’affaire oblige aujourd’hui Perben et le Conseil supérieur de la magistrature à ouvrir une enquête en attendant un procès. “Les conduites observées dans la vie privée ont une incidence sur l’image du ministère public et sur la capacité de ses membres à demeurer en son sein“, avait doctement exposé le proc’ devant ses collègues européens avant de payer ses ébats avec la carte volée. Si le tribunal lui applique ces nobles principes, il est dans une mauvaise passe. »

Ce qu’il faut retenir de cet épisode judiciaire, c’est moins l’urgente nécessité de revoir le traitement des magistrats à la hausse pour qu’ils puissent s’offrir quelques moments de détente à leurs frais, que le fait de ne pas être sérieux permet de (presque) tout écrire.
NW.