En 2016, lorsque Hayao Miyazaki était interrogé sur l’utilisation de l’Intelligence Artificielle (IA) dans la création artistique, celui-ci répondait que « c’est une insulte à la vie elle-même ». Aujourd’hui, en 2025, les réseaux sociaux sont inondés d'images générées par ChatGPT, qui reprennent le style du célèbre studio d’animation Ghibli fondé par Miyazaki, un phénomène désormais connu sous le nom de « Ghibli Effect ».
On a ainsi pu voir de nombreux responsables politiques utiliser cette nouvelle fonctionnalité, que ce soit en France, ou encore aux États-Unis, où l’administration Trump a publié l’image d’une personne expulsée du pays, dans le style du célèbre studio d’animation japonais.
D’un point de vue juridique, ces nouvelles images générées par IA posent plusieurs problèmes, notamment en termes de droit d’auteur et de données personnelles.
Premièrement, le studio Ghibli n'a jamais donné son autorisation pour que des images inspirées de son style emblématique soient créées par des IA génératives.
Toutefois lorsqu’on demande à ChatGPT d’expliquer en quoi elle aurait le droit de générer des images reprenant le style du célèbre studio d’animation, celle-ci rétorque que les images qu’elle génère « s’inspirent de ce style sans imiter directement ou reproduire des éléments protégés ».
En effet, en France, il est de jurisprudence constante qu’un auteur ne peut engager une action en contrefaçon en cas de reproduction du style de son œuvre ¹. Toutefois, il en va différemment lorsqu’il y a reproduction de « ce qui caractérise l'expression particulière et originale que le premier artiste a donnée à sa pensée »². Reste à déterminer si les images créées par ChatGPT relèvent d'une simple inspiration stylistique ou de la reproduction de l'expression originale caractéristique propre à l'œuvre du studio Ghibli.
Deuxièmement, la question de la base de données sur laquelle ChatGPT s'entraîne pour produire ces images soulève un autre débat. En l'absence de licence d'utilisation, l'entraînement de l'IA sur les œuvres animées du studio pourrait être considéré comme un acte de contrefaçon de droits d'auteur. Josh Weigensberg, avocat américain spécialisé en propriété intellectuelle, a indiqué qu'une question centrale se pose : OpenAI dispose-t-il « d'une licence ou d'une autorisation pour mener cet entraînement ». Aucune réponse n’a été apportée par OpenAI à cette date³.
C'est précisément pour éviter de telles situations opaques que l'AI Act, législation pionnière en matière d'intelligence artificielle, impose une obligation de transparence aux entités utilisant des systèmes d'IA génératives. Le règlement oblige en effet ces entités à publier un résumé suffisamment détaillé des données utilisées pour l'entraînement de leurs modèles. Un système d’IA tel que ChatGPT pourrait ainsi être contraint à révéler, sans que cela ne soit une atteinte au secret des affaires, si les œuvres du studio Ghibli ont été utilisées pour générer les images litigieuses.
Dans l'effervescence du phénomène, de nombreux utilisateurs ont téléchargé des photos d’eux-mêmes, (donc des données personnelles), dans ChatGPT pour recréer ces images dans le style Ghibli. Luiza Jarovsky, juriste spécialisée en intelligence artificielle, met en garde contre cette tendance, soulignant que ces utilisateurs ont agi de manière volontaire, permettant ainsi à l'IA générative de réutiliser ces données personnelles pour son entraînement⁴.
En effet, le RGPD prévoit dans son article 6.1.a que « le traitement n'est licite que si, et dans la mesure où, au moins une des conditions suivantes est remplie : la personne concernée a consenti au traitement de ses données à caractère personnel pour une ou plusieurs finalités spécifiques […] ».
Or, il est explicitement précisé dans la politique de confidentialité de ChatGPT, dans la section « 2. Données personnelles que nous collectons » que : « nous recueillons les Données à caractère personnel contenues dans les données d’entrée que vous fournissez à nos Services, y compris vos prompts et d’autres contenus que vous téléchargez, comme […] des images ».
Cependant, l’article 7 du RGPD propose une solution grâce à son mécanisme d’opt-out, permettant à l’utilisateur de demander la suppression de ses données personnelles collectées par l’IA générative.
En définitive, face aux avancées rapides de l’IA et aux problématiques juridiques qu'elles engendrent, les auteurs ne restent pas passifs. En effet, que ce soit en Europe ou Outre-Atlantique, des levées de boucliers se multiplient, accompagnées de recours judiciaires⁵,9 de plus en plus fréquents pour défendre leurs droits d’auteur et contrer l’exploitation non autorisée de leurs œuvres par les IA.
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¹ TGI Paris, 3e ch., 17 janv. 1977, Brasilier c/ Grosperrin, RTD com. 1978. 568, obs. Desbois.
² 3 TGI Paris, 3e ch., 1er avr. 1987 Poncelet c/ Presse Office.
³ https://www.pryorcashman.com/publications/weigensberg-comments-on-ai-and-copyright-concerns
⁴ https://www.luizasnewsletter.com/p/openais-viral-privacy-trick
⁵ https://livv.eu/articles/plainte-meta-etats-unis-violation-droit-dauteur
⁶ https://livv.eu/articles/plainte-meta-etats-unis-violation-droit-dauteur