A la suite d’un avis d’inaptitude d’un salarié, l’employeur est dispensé de toute recherche de reclassement, et donc de consulter le CSE sur son reclassement[1], à la condition que l’avis d’inaptitude mentionne exactement l’une des deux formules suivantes :
— « tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé » ;
— « l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi »[2].
La Cour de cassation veille à une application stricte de cette règle. Elle a considéré, dans un arrêt du 13 septembre 2023, que lorsque l'avis d'inaptitude du médecin du travail mentionne que « tout maintien du salarié dans un emploi dans cette entreprise serait gravement préjudiciable à sa santé » et, non pas, que « tout maintien dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé », l'employeur n'est pas dispensé de son obligation de procéder à des recherches de reclassement[3].
Cette interprétation à la lettre des dispositions du Code du travail n’est toutefois guère surprenante puisqu’elle s’inscrit dans la droite ligne de la jurisprudence de la Cour de cassation en la matière[4].
Toute précipitation dans la mise en œuvre de la procédure de licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement est à proscrire : une lecture consciencieuse de l’avis rendu apparait indispensable, afin de déterminer l’existence ou non d’une obligation de rechercher un poste de reclassement mais également son étendue.
Au surplus, dans un arrêt du 13 décembre 2023 publié au Bulletin, la Chambre sociale a précisé que l’employeur n’était pas dispensé de son obligation de reclassement, quand bien même le Médecin du travail aurait coché la case indiquant que « l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi »[5], dès lors qu’il précise ensuite, au sein de l’avis, que l’état de santé du salarié « fait obstacle sur le siteà tout reclassement dans un emploi ». La Cour de cassation a alors considéré qu’il appartenait à l’employeur de rechercher un poste de reclassement hors de l’établissement auquel le salarié était affecté.
Une lecture rigoureuse de l’entier avis de la médecine du travail s’impose donc quand bien même l’un des deux cas légaux de dispense de recherche de reclassement serait coché par le Médecin du travail, l’employeur devant s’assurer de l’absence de mention complémentaire susceptible de réduire le périmètre de la dispense de reclassement et ainsi la neutraliser partiellement.
En outre, votre obligation de reclassement peut également s’étendre aux postes de classification supérieure[6].
Le Conseil d’État a récemment considéré que la circonstance que les postes disponibles confèreraient le statut de cadre, en cas de reclassement, alors que le salarié dont le licenciement est envisagé a le statut d’agent de maîtrise, ne dispense pas l’employeur de les lui proposer dans le cadre de la recherche de reclassement, dès lors qu’il s’agit de fonctions comparables à celles précédemment exercées par le salarié.
En d’autres termes, une classification supérieure n’est pas exclusive du caractère équivalent de l’emploi à proposer.
Pour rappel, tout manquement à l’obligation de rechercher un poste de reclassement (et/ou de procéder à une recherche loyale et sérieuse) prive le licenciement de cause réelle et sérieuse[7], et entraine la condamnation de l’employeur au paiement de dommages-intérêts et d’une indemnité compensatrice de préavis, ainsi qu’au remboursement à Pôle emploi des allocations chômage éventuellement versées à son ancien salarié, dans la limite de 6 mois.
Nos avocats du pôle Social se tiennent à votre disposition pour répondre à toutes vos interrogations en matière de santé au travail et former vos équipes.
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Pôle social
[1] Cass. soc. 16 novembre 2022 pourvoi n°21-17.255
[2] C. trav., art. L. 1226-2-1 ; C. trav., art. L. 1226-12
[3] Cass. soc. 13 septembre 2023 pourvoi n° 22-12.970
[4] Voir en ce sens Cass. soc. 8 février 2023 pourvoi nº 21-11.356
[5] Cass. soc. 13 décembre 2023 pourvoi n°22-19.603 publié au Bulletin
[6] CE 21 juillet 2023 nº 457196
[7] Cass. soc. 26 mai 2004 pourvoi n° 02-43.969