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03.05.2015 22:46 Il y a: 10 yrs
Categorie: Droit des Technologies Avancées, Informatique, libertés et vie privée
Auteur : Me Charruyer - Avocat Toulouse - Conseil et Contentieux

Licencié pour avoir tweeté ! Je pense comme je tweet ?


La jurisprudence traitant des licenciements ayant pour cause des propos tenus sur Twitter est encore naissante. Néanmoins un parallèle est à faire avec les procédures de licenciement de salariés trop bavards sur leur « mur » Facebook. Qu’ils soient ou non sous la subordination de leur employeur, les salariés jouissent de libertés individuelles : Mais dans quelle mesure eu égard à l’utilisation du réseau social Twitter ?   I - Un salarié peut-il être licencié pour des propos injurieux tenus sur Twitter* ? Un employeur est tout à fait en droit de procéder au licenciement d’un salarié pour des propos que celui-ci aurait tenu sur un réseau social tel que Twitter. Mais il convient de distinguer deux situations : a) Les faits relevant uniquement de la vie personnelle du salarié sont ceux dépourvus de tout lien avec l’employeur ou l’entreprise c’est-à-dire n’emportant aucune conséquence sur les relations de travail entre l’employeur et le salarié. Malgré le caractère externe à l’entreprise, si ces faits provoquent un trouble caractérisé au sein de l’entreprise, compte tenu des fonctions du salarié et de la finalité de l’entreprise, ils peuvent constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement. La légitimité du licenciement dépendra pour beaucoup du retentissement incriminé à l’intérieur et à l’extérieur de l’entreprise. L’employeur est donc en droit de prononcer un licenciement pour un fait tiré de la vie privée du salarié, dans le cadre de restrictions limitées. b) Les faits commis par le salarié qui sont liés à son travail, soit parce qu’ils se rattachent à sa vie professionnelle, soit parce qu’ils caractérisent un manquement aux obligations découlant du contrat de travail, l’employeur retrouve le droit de prononcer une sanction pouvant aller jusqu’au licenciement disciplinaire. A titre d’exemple, Pierre Salviac journaliste sportif de RTL avait été licencié pour des propos sexistes tenus sur Twitter à l’encontre de Valérie Trierweiller en 2012. Le salarié reste, en effet, tenu à certaines obligations découlant du contrat de travail même en dehors du champ professionnel : il en va ainsi de son obligation de loyauté et de probité. Ces principes dégagés par la jurisprudence s’appliquent précisément aux licenciements tirés de l’utilisation de ces outils de communication ou support d’expression publique que sont Facebook, Twitter, Blogs… II - Le paramétrage de la confidentialité du compte : Variable justifiant le licenciement ? Lorsqu’il quitte l’entreprise et se trouve à son domicile notamment, le salarié s’estime a priori libre de ses faits et gestes. Toutefois comme dans d’autres secteurs, le phénomène d’interconnexion créé par Internet brouille cette frontière naturelle. En utilisant les réseaux sociaux depuis un lieu étranger à son travail, le salarié communique dans une sphère privée en principe hermétique. Mais le paramétrage de ces réseaux sociaux joue pour beaucoup sur le caractère privé ou public des propos qui sont tenus aux yeux des juges. Si le profil est ouvert, toute personne qui le désire aura accès aux messages publiés par le « tweetos », messages qui pourront être connus de tous et donc par l’employeur. Pour justifier le licenciement, les juges vont donc faire une différence suivant que votre profil sur le réseau social soit paramétré en mode public ou en mode privé. Selon vos paramétrages, vous pourrez peut-être être sauvé… Les amis de mes amis ne sont pas forcément ceux que l’on croit… Votre employeur veille et vous surveille… III - Pour twitter protégé, twitter anonyme ? Croire que l’on peut bénéficier d’une impunité en twittant sous un pseudonyme est parfaitement illusoire. Même si les juges ont pu estimer qu’un licenciement était injustifié lorsqu’une salariée tenait des propos injurieux à l’encontre de son employeur en utilisant un pseudonyme et lorsque les propos visaient des personnes qui n’étaient pas identifiables au sein de l’entreprise[1], des limites sont à émettre.   En effet, il ne faut pas croire que le pseudonyme procure un anonymat sans faille permettant de  twitter sans limites. L’employeur a en effet la possibilité de mettre en œuvre des procédures judiciaires pour obtenir les éléments nécessaires à l’identification du salarié (et notamment son adresse IP), permettant ensuite sa sanction. IV - Agir en amont pour le chef d’entreprise : l’instauration d’une charte informatique pour sensibiliser les salariés Concernant l’usage des outils informatiques sur le lieu de travail, il est recommandé d’être d’une transparence totale avec ses collaborateurs. Pour ce faire, il convient de les sensibiliser à cette thématique en mettant en place une charte informatique pour définir les contours de l’utilisation des outils informatiques. Cette charte pourra être annexée au règlement intérieur pour la rendre opposable aux salariés, et donc d’en sanctionner les violations. Malgré tout, il faut garder à l’esprit que la diffusion par les salariés de messages relatifs à leurs conditions de travail ne traduit pas systématiquement une volonté de nuire à l’employeur mais peut également révéler un problème de mal-être au travail. Le management des employeurs doit donc s’adapter à ces nouvelles technologies de communications et prendre en compte les problématiques qu’elles peuvent révéler, notamment en termes de risques psycho-sociaux.  Maître France CHARRUYER, avocat associé fondateur ALTIJ avocats * Cet article n’intègre pas les dernières jurisprudences « Facebook » qui feront l’objet d’un nouvel article dans notre chronique « to clic or not to clic ? » 
[1] CA Versailles 12 novembre 2013 N°12-03153