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< DU DPO, Paris Dauphine
07.02.2019 12:02 Age: 6 yrs
Category: Droit des Personnes et du Patrimoine
By: Frédéric Dagras - Avocat Toulouse

Le droit à récompense : On ne gagne pas à tous les coups


Un mouvement de compte, l’utilisation d’un héritage durant la vie de la communauté pourra faire naître un droit à récompense au profit de l’un des époux. On le rappelle brièvement, une récompense « est une indemnité due, lors de la liquidation de la communauté, par l’époux à cette communauté, lorsque, au détriment de celle-ci, le patrimoine personnel s’est enrichi ; due par la communauté à l’époux, lorsque les biens propres de celui-ci ont servi à augmenter la masse commune » (Lexique des termes juridiques, 16e edt. 2007, Dalloz) (v. ens. art. 1433, 1434 et 1469 C.civ) Les comptes de récompenses sont, dans un régime d’essence communautaire, une opération liquidative importante que tant le notaire liquidateur comme l’avocat conseil devront surveiller de près. (art. 1468 C.civ) Une situation toute particulière mérite l’attention des praticiens : celle où la communauté à liquider est débitrice de plusieurs récompenses au profit des époux et que celle-ci n’a plus d’actif net à partager.  Le temps judiciaire dans un divorce contentieux est tel qu’il peut faire apparaître des situations où la date des effets du divorce fixant la composition de la communauté à liquider, se trouve très espacée de la liquidation effective.  Moins-values, partage verbal, remploi partiel, apurement des comptes, il y a des successions et des divorces où la communauté à partager fait apparaître des comptes de récompenses créditeurs et un actif très faible voire nul. 

Quid ? Qu’elles sont les conséquences liquidatives d’un tel schéma ? 

Premièrement, une communauté déficitaire peut faire apparaître un conflit sur l’attribution du reliquat de communauté. Si les deux époux sont créanciers de la communauté et que les liquidités disponibles ne suffisent pas à remplir le droit de prélèvement des époux l’article 1471 alinéa 2 du Code Civil prévoit que « si les époux veulent prélever le même bien, il est procédé par voie de tirage au sort ». 
Mais que se passe t’il quand la communauté est déficitaire en actif meuble et immeuble pour apurer les comptes des époux ? 
A cette hypothèse le Code Civil appose une solution qu’il faut connaitre : L’article 1472 du Code Civil prévoit :  « En cas d'insuffisance de la communauté, les prélèvements de chaque époux sont proportionnels au montant des récompenses qui lui sont dues. Toutefois, si l'insuffisance de la communauté est imputable à la faute de l'un des époux, l'autre conjoint peut exercer ses prélèvements avant lui sur l'ensemble des biens communs ; il peut les exercer subsidiairement sur les biens propres de l'époux responsable. » Ainsi, l’époux pourtant créancier, pourra voir au titre de la liquidation apparaitre une perte sèche au titre de ses comptes de récompenses.  Dans l’hypothèse où les deux époux sont débiteurs de récompenses, la règle des prélèvements proportionnels a pour but de ventiler le potentiel reliquat et ainsi ne pas créer une disparité dans la liquidation.  La seule voie de salut pour le conjoint lésé est de prouver une faute de gestion de la part de l’autre, pour élargir l’assiette du droit de prélèvement au patrimoine propre de l’autre époux. Dépenses excessives, augmentation fautive du passif, faute dans l’administration des biens, sont autant de pistes à explorer si une situation telle que celle-ci se présente.  Si l’insuffisance ne peut être imputée à un des deux époux, aucun recours n'est ouvert sur leurs biens personnels et la perte est définitive pour chacun d'entre eux. L'époux créancier de récompense ne peut non plus prétendre exercer par la voie de l'action oblique les droits dont ce conjoint se trouve titulaire au titre de propre (Cass. 1re civ., 1er déc. 1981). Dans l’hypothèse d’une faute partagée des deux époux, il ne sera pas opportun de la soulever, la solution reviendrait au même point et il conviendra de faire une application stricto sensu de l’article 1472 du Code Civil.  Ainsi, ce constat devra nécessairement être fait en amont dans vos projections liquidatives. Il conviendra d’arbitrer les masses et de déterminer, en présence de compte de récompense créancier, s’il est opportun de se lancer dans une procédure contentieuse et pouvant être coûteuse pour des sommes potentiellement irrécouvrables.  Dans l’affirmative n’oubliez pas, si elle existe, de prouver la faute de gestion de l’époux défendeur pour élargir l’assiette de recouvrement à son patrimoine personnel.  Le Cabinet ALTIJ, de par la diversité de ses compétences en matière familiale, patrimoniale et fiscale, se tient à votre disposition pour vous apporter une solution adaptée à vos besoins et demandes.